En 1943, deux anciens élèves de Polytechnique, Georges Salet et Louis Lafont, publiaient aux Editions Franciscaines un essai intitulé L’évolution régressive . Les auteurs de cette remarquable étude, très documentée, s’y attaquaient à la pseudo-science de l’évolution dont M.Paul Lemoine, professeur de Géologie et directeur du Museum d’histoire naturelle de 1920 à 1940, disait : « L’évolution est une sorte de dogme auquel ses prêtres ne croient plus mais qu’ils maintiennent pour leur peuple ».
Pour ces deux ingénieurs, le monde primitif, parfait, harmonieusement finalisé à l’ «âge d’or» qu’ils situent avant l’ère primaire, ce monde devenu « nature » doit à la Chute sa propre dégénérescence sur le plan vital. La faute du premier homme et celles de ses descendants troublèrent l’harmonie du monde. C’est le péché qui a imprimé à l’évolution son mouvement régressif. Comme le remarque le R.P Le Floch, qui fut supérieur du séminaire Français de Rome. Georges Salet et Louis Lafont, «en savants, en catholiques, ne craignent pas de poser dans toute sa force le dogme du péché originel, puis celui de la Rédemption du Christ».
La Rédemption offre à l’homme l’instrument de sa propre sanctification mais aussi la possibilité, du fait de la réversibilité, de réassocier le monde à sa sainteté retrouvée. Le monde en effet n’a d’être déifiable qu’en l’homme. Pour les deux ingénieurs, seule la Rédemption peut interrompre le déclin de la nature et la conduire vers un état de plus grande perfection. Son terme c’est la vie transfigurée, «théophanique». Le progrès cosmologique est conditionné par le retour de l’humanité à Dieu, comme l’affirme avec force Frank-Duquesne dans Cosmos et Gloire : «Quand l’humanité sera devenue, sans possibilité de retour, “la maisonnée de Dieu” (Eph.,2 :19), la nature, qui est la maisonnée de l’homme, aura part à la liberté glorieuse de celui-ci »
Dans la perspective chrétienne, rappelons-le, la cosmologie se trouve incluse dans l’anthropologie. L’inverse ne se vérifie que dans les systèmes gnostiques ou d’autres spéculations humaines qui font du salut de l’homme un élément du drame cosmique. Selon saint Paul, au contraire, c’est l’univers qui suit le destin de l’homme.
Parmi tous les sujets abordés dans l’essai, celui de l’agressivité des animaux nous paraît apporter l’éclairage le plus convaincant à la thèse de l’évolution régressive. Maurice Zundel dans un article intitulé Le vide créateur cherche à expliquer la formation des organes offensifs des bêtes. Sa foi ne l’incite pas à minimiser le scandale du mal et la cruauté sévissant dans l’univers infra-humain où une biologie féroce se déchaîne. Dans le règne animal les comportements agressifs prédominent et les armes, offensives et défensives, ont atteint une telle perfection qu’il semble raisonnable pour beaucoup de partisans de la théorie évolutionniste de Darwin de les attribuer à la pression de la sélection naturelle.
Suivant les données scientifiques modernes Zundel exclut d’emblée l’hypothèse créationniste qui se heurte à de grandes difficultés théologiques, et à l’impossibilité de concilier la bonté de Dieu et l’état présent du monde, le Dieu évangélique et la cruauté d’un ordre naturel indifférent à toutes les valeurs de l’esprit. Pour lui les armes d’attaque et de défense des animaux («la griffe, le bec, le croc, la pince, la scie, le dard, le venin, la ruse») sont le fruit non point de l’Evolution, au sens moderne du mot, mais d’une évolution dont l’élucidation des mécanismes nous dévoile une autre aspect du mystère de la réversibilité.
Dieu ne pouvant être impliqué dans le mal de ce monde, la cause de cette évolution régressive n’est imputable qu’à des agents intelligents ayant mutilé, déformé le rayonnement divin qui, à travers eux, devait se communiquer aux créatures dépourvues de raison : « Nous sommes loin, écrit-il d’un geste créateur accompli comme un coup de baguette magique. Le Dieu intérieur ne se prête pas à ces images d’Epinal. La création dont il est l’origine ne peut être qu’une histoire à deux, une histoire d’amour qui requiert tellement notre consentement qu’elle aboutit pour Lui, en cas de refus, à rien moins que la Croix, qui est la pathétique révélation de Son Visage».
Sa position se complique du fait que ces mutations se sont selon lui produites antérieurement à l’apparition temporelle de l’homme. Soucieux d’accorder le récit de la Genèse avec la science officielle qui fait remonter l’homme seulement au quaternaire, il propose une autre hypothèse : « Pourrait-on invoquer la défaillance d’autres intelligences antérieures à l’homme et apparues dans d’autres régions de notre univers ou celle des anges chargés de lui et infidèles à leur mission ? ».
Les théosophes chrétiens, Saint-Martin par exemple, considéraient la chute des anges rebelles comme infiniment plus grave que celle des hommes. Paracelse, avant lui, se refusait à voir dans le désordre cosmique les conséquences de la chute d’Adam, agent trop peu puissant à ses yeux. Conception que reprendront Jakob Boehm et, plus près de nous, le théologien catholique Louis Bouyer selon lequel la chute luciférienne permet seule d’expliquer la lutte mortelle pour leur survie de toutes les espèces animales «dans un monde créé bon par le Dieu de toute bonté» et la présence insolite du serpent dans le jardin d’Eden. Les drames de la vie animale sont pour lui une attestation particulièrement frappante de la chute cosmique «pré-humaine» : (voir aussi cet article sur la guerre des anges
Pour ces deux ingénieurs, le monde primitif, parfait, harmonieusement finalisé à l’ «âge d’or» qu’ils situent avant l’ère primaire, ce monde devenu « nature » doit à la Chute sa propre dégénérescence sur le plan vital. La faute du premier homme et celles de ses descendants troublèrent l’harmonie du monde. C’est le péché qui a imprimé à l’évolution son mouvement régressif. Comme le remarque le R.P Le Floch, qui fut supérieur du séminaire Français de Rome. Georges Salet et Louis Lafont, «en savants, en catholiques, ne craignent pas de poser dans toute sa force le dogme du péché originel, puis celui de la Rédemption du Christ».
La Rédemption offre à l’homme l’instrument de sa propre sanctification mais aussi la possibilité, du fait de la réversibilité, de réassocier le monde à sa sainteté retrouvée. Le monde en effet n’a d’être déifiable qu’en l’homme. Pour les deux ingénieurs, seule la Rédemption peut interrompre le déclin de la nature et la conduire vers un état de plus grande perfection. Son terme c’est la vie transfigurée, «théophanique». Le progrès cosmologique est conditionné par le retour de l’humanité à Dieu, comme l’affirme avec force Frank-Duquesne dans Cosmos et Gloire : «Quand l’humanité sera devenue, sans possibilité de retour, “la maisonnée de Dieu” (Eph.,2 :19), la nature, qui est la maisonnée de l’homme, aura part à la liberté glorieuse de celui-ci »
Dans la perspective chrétienne, rappelons-le, la cosmologie se trouve incluse dans l’anthropologie. L’inverse ne se vérifie que dans les systèmes gnostiques ou d’autres spéculations humaines qui font du salut de l’homme un élément du drame cosmique. Selon saint Paul, au contraire, c’est l’univers qui suit le destin de l’homme.
Parmi tous les sujets abordés dans l’essai, celui de l’agressivité des animaux nous paraît apporter l’éclairage le plus convaincant à la thèse de l’évolution régressive. Maurice Zundel dans un article intitulé Le vide créateur cherche à expliquer la formation des organes offensifs des bêtes. Sa foi ne l’incite pas à minimiser le scandale du mal et la cruauté sévissant dans l’univers infra-humain où une biologie féroce se déchaîne. Dans le règne animal les comportements agressifs prédominent et les armes, offensives et défensives, ont atteint une telle perfection qu’il semble raisonnable pour beaucoup de partisans de la théorie évolutionniste de Darwin de les attribuer à la pression de la sélection naturelle.
Suivant les données scientifiques modernes Zundel exclut d’emblée l’hypothèse créationniste qui se heurte à de grandes difficultés théologiques, et à l’impossibilité de concilier la bonté de Dieu et l’état présent du monde, le Dieu évangélique et la cruauté d’un ordre naturel indifférent à toutes les valeurs de l’esprit. Pour lui les armes d’attaque et de défense des animaux («la griffe, le bec, le croc, la pince, la scie, le dard, le venin, la ruse») sont le fruit non point de l’Evolution, au sens moderne du mot, mais d’une évolution dont l’élucidation des mécanismes nous dévoile une autre aspect du mystère de la réversibilité.
Dieu ne pouvant être impliqué dans le mal de ce monde, la cause de cette évolution régressive n’est imputable qu’à des agents intelligents ayant mutilé, déformé le rayonnement divin qui, à travers eux, devait se communiquer aux créatures dépourvues de raison : « Nous sommes loin, écrit-il d’un geste créateur accompli comme un coup de baguette magique. Le Dieu intérieur ne se prête pas à ces images d’Epinal. La création dont il est l’origine ne peut être qu’une histoire à deux, une histoire d’amour qui requiert tellement notre consentement qu’elle aboutit pour Lui, en cas de refus, à rien moins que la Croix, qui est la pathétique révélation de Son Visage».
Sa position se complique du fait que ces mutations se sont selon lui produites antérieurement à l’apparition temporelle de l’homme. Soucieux d’accorder le récit de la Genèse avec la science officielle qui fait remonter l’homme seulement au quaternaire, il propose une autre hypothèse : « Pourrait-on invoquer la défaillance d’autres intelligences antérieures à l’homme et apparues dans d’autres régions de notre univers ou celle des anges chargés de lui et infidèles à leur mission ? ».
Les théosophes chrétiens, Saint-Martin par exemple, considéraient la chute des anges rebelles comme infiniment plus grave que celle des hommes. Paracelse, avant lui, se refusait à voir dans le désordre cosmique les conséquences de la chute d’Adam, agent trop peu puissant à ses yeux. Conception que reprendront Jakob Boehm et, plus près de nous, le théologien catholique Louis Bouyer selon lequel la chute luciférienne permet seule d’expliquer la lutte mortelle pour leur survie de toutes les espèces animales «dans un monde créé bon par le Dieu de toute bonté» et la présence insolite du serpent dans le jardin d’Eden. Les drames de la vie animale sont pour lui une attestation particulièrement frappante de la chute cosmique «pré-humaine» : (voir aussi cet article sur la guerre des anges
Sur ce point il se sépare de Georges Salet et Louis Lafont qui ont abordé cette question dans leur essai. Ils fondent leur argumentation sur le récit de la Genèse qui montre l’homme établi par Dieu roi de la création inférieure. Saint Paul affirme que c'est pour lui que le monde a été fait. L’évolution fâcheuse de la Nature est donc une conséquence naturelle de l’action néfaste de l’homme et de son péché. Comme Maurice Zundel, ils rejettent l’idée selon laquelle une intervention directe de Dieu, en dehors des lois de la nature, serait à l’origine des transformations qui se sont effectuées sur la planète. Dans leur esprit l’homme seul est responsable du déclin évolutif : «Après avoir réalisé une Création excellente, Dieu ne pouvait y introduire Lui-même le désordre». Ailleurs ils écrivent à propos de la bénédiction génésiaque : « Si vraiment la tempête détruisait le nid des oiseaux, s’il existait des araignées se précipitant sur l’insecte pris dans la toile, si les animaux se dévoraient entre eux, on a assez de peine à concevoir que le Dieu d’amour ait déclaré : "Tout est éminemment bien"».
Toute leur démonstration repose sur l’affirmation de l’existence d’un «âge d’or», époque d’harmonie où la mort était inconnue, et d’une évolution régressive, depuis l’âge d’or jusqu’à nos jours, ayant résulté de la faute du premier homme et celle de ses descendants. Dans leur conception ce n’est pas l’animal qui devient progressivement homme, c’est l’homme qui, dans des races peut-être plus coupable que d’autres, rétrograde vers l’animalité. Ils voient là l’origine des sauvages et des races préhistoriques présentant un caractère simiesque : «Leçon terrible pour l’Homme qui a voulu se faire semblable à Dieu et qui a perdu une partie des caractères qui élevaient son corps au dessus de celui de l’animal» .
Les deux hommes, dans cet essai, cherchent à prendre leur distance avec les tenants de l'évolutionnisme modéré, mitigé de spiritualisme qui, à leur époque, avait acquis droit de cité dans les milieux théologiques prétendument éclairés où s’élaboraient toutes sortes de synthèses scientifico-religieuses visant à concilier le Dogme de la Création avec les théories transformistes. Celles-ci, précisent-ils, ainsi que les conceptions scientifiques des darwinistes, mutationnistes peuvent s’accorder à leur thèse de l’évolution, à condition qu’elles soient dégagées de toute philosophie mécaniste et matérialiste.
Selon nous il n’est point nécessaire de souscrire à l’affirmation d’une antériorité de l’ «Age d’or» aux périodes géologiques pour donner tout son poids à la thèse de l’évolution régressive. Celle-ci se suffit à elle-même. C’est sous l’éclairage de la réversibilité qu’il convient de l’examiner. L’étude des modifications qui ont transformé les êtres vivants au cours des âges s’avère à ce titre riche d’enseignements. Les deux auteurs affirment qu’au moment de la création de l’homme tous les animaux étaient herbivores ou végétariens. Ainsi le tigre actuel avec ses canines (d’une longueur de 75 à 90mm) proviendrait-il par évolution d’un type primitivement herbivore, passé au cours des ères géologiques au stade omnivore, puis exclusivement carnivore. Quant aux organes offensifs des bêtes sur lesquels nous nous sommes attardés, organes d’attaques contre d’autres animaux, il est probable selon eux qu’ «ils n’existaient pas ou avaient d’autres fonctions : c’est actuellement l’avis des spécialistes. Pour M.Broom, l’organe électrique du poisson torpille, avec lequel il foudroie l’adversaire, est un muscle transformé. Le dard des abeilles et des guêpes servait primitivement à déposer les œufs» .
Ouvrons une parenthèse. Le requin blanc, véritable merveille de la nature, à la ligne si majestueuse, était-il à l’origine ce poisson carnivore qui nous effraie tant aujourd’hui, au point d’être surnommé «la mort blanche» ? Etait-il doté de ces dents meurtrières, à ce point acérées qu’elles lui permettent de déchirer d’un coup de mâchoire la chair de ses proies, de les déchiqueter, et même percer la carapace des tortues de mer ? Nous ne le croyons pas. Nous savons d’ailleurs maintenant que, contrairement aux idées reçues, les requins ont évolué, les formes fossiles différant de leurs cousins actuels. On oublie d’ailleurs que les requins ne sont pas tous ces prédateurs des mers qui hantent nos cauchemars. Beaucoup d’entre eux se contentent de dévorer…du plancton, comme le requin baleine, le plus grand poisson du monde ou le requin pèlerin.
Toute leur démonstration repose sur l’affirmation de l’existence d’un «âge d’or», époque d’harmonie où la mort était inconnue, et d’une évolution régressive, depuis l’âge d’or jusqu’à nos jours, ayant résulté de la faute du premier homme et celle de ses descendants. Dans leur conception ce n’est pas l’animal qui devient progressivement homme, c’est l’homme qui, dans des races peut-être plus coupable que d’autres, rétrograde vers l’animalité. Ils voient là l’origine des sauvages et des races préhistoriques présentant un caractère simiesque : «Leçon terrible pour l’Homme qui a voulu se faire semblable à Dieu et qui a perdu une partie des caractères qui élevaient son corps au dessus de celui de l’animal» .
Les deux hommes, dans cet essai, cherchent à prendre leur distance avec les tenants de l'évolutionnisme modéré, mitigé de spiritualisme qui, à leur époque, avait acquis droit de cité dans les milieux théologiques prétendument éclairés où s’élaboraient toutes sortes de synthèses scientifico-religieuses visant à concilier le Dogme de la Création avec les théories transformistes. Celles-ci, précisent-ils, ainsi que les conceptions scientifiques des darwinistes, mutationnistes peuvent s’accorder à leur thèse de l’évolution, à condition qu’elles soient dégagées de toute philosophie mécaniste et matérialiste.
Selon nous il n’est point nécessaire de souscrire à l’affirmation d’une antériorité de l’ «Age d’or» aux périodes géologiques pour donner tout son poids à la thèse de l’évolution régressive. Celle-ci se suffit à elle-même. C’est sous l’éclairage de la réversibilité qu’il convient de l’examiner. L’étude des modifications qui ont transformé les êtres vivants au cours des âges s’avère à ce titre riche d’enseignements. Les deux auteurs affirment qu’au moment de la création de l’homme tous les animaux étaient herbivores ou végétariens. Ainsi le tigre actuel avec ses canines (d’une longueur de 75 à 90mm) proviendrait-il par évolution d’un type primitivement herbivore, passé au cours des ères géologiques au stade omnivore, puis exclusivement carnivore. Quant aux organes offensifs des bêtes sur lesquels nous nous sommes attardés, organes d’attaques contre d’autres animaux, il est probable selon eux qu’ «ils n’existaient pas ou avaient d’autres fonctions : c’est actuellement l’avis des spécialistes. Pour M.Broom, l’organe électrique du poisson torpille, avec lequel il foudroie l’adversaire, est un muscle transformé. Le dard des abeilles et des guêpes servait primitivement à déposer les œufs» .
Ouvrons une parenthèse. Le requin blanc, véritable merveille de la nature, à la ligne si majestueuse, était-il à l’origine ce poisson carnivore qui nous effraie tant aujourd’hui, au point d’être surnommé «la mort blanche» ? Etait-il doté de ces dents meurtrières, à ce point acérées qu’elles lui permettent de déchirer d’un coup de mâchoire la chair de ses proies, de les déchiqueter, et même percer la carapace des tortues de mer ? Nous ne le croyons pas. Nous savons d’ailleurs maintenant que, contrairement aux idées reçues, les requins ont évolué, les formes fossiles différant de leurs cousins actuels. On oublie d’ailleurs que les requins ne sont pas tous ces prédateurs des mers qui hantent nos cauchemars. Beaucoup d’entre eux se contentent de dévorer…du plancton, comme le requin baleine, le plus grand poisson du monde ou le requin pèlerin.
Pour nos deux savants, le monde actuel est donc le résultat d’une perversion impliquant une action distincte de l’action créatrice de Dieu. Ils sont donc amenés à défendre la thèse d’une influence désastreuse de l’homme sur l’évolution de la vie. Elle est soutenue par leur croyance en une perfection originelle coïncidant avec la période de l’âge d’or, antérieure aux ères géologiques, où l’espèce humaine n’apparaît qu’en dernier, et en sa ruine par le péché de l’homme. Pour Zundel c’est justement cette apparition tardive de l’homme qui rend cette thèse problématique. Elle contredit les catégories gnoséologiques de l’espace et du temps dont l’investigation scientifique est tributaire. La question de l’influence humaine nécessite donc à ses yeux de poser le principe d’une durée intemporelle, condition d'une redéfinition du péché originel comme «moment d'éternité» qui se réactualise à chaque fois que l'homme profane sa vocation essentielle :
«Faudrait-il admettre que la faute originelle de l’homme (toute faute est, dans une certaine mesure, une faute originelle dans la mesure où elle implique un refus d’être origine) a pu désaxer l’évolution de la vie infra-humaine avant d’être effectivement commise, comme le Christ a pu sanctifier avant de naître des générations qui mettaient leur espoir dans une Rédemption obscurément promise ? Pour répondre à cette question, il importerait peut-être de se demander si la vie de l’esprit se situe dans la même durée que la vie organique (…) La conception même d’un univers, d’une totalité d’espace-temps comme d’un immense réseau en perpétuelle interaction est d’ailleurs une invention humaine. D’où prendrions-nous cette vue d’ensemble sur ces dimensions spatio-temporelles si nous étions totalement enfermés en elles ? Il se peut donc qu’en un point d’éternité, si l’on peut dire, nous ayons la possibilité d’être présents et d’agir partout et à n’importe quelle mesure temporelle».
Un autre thème peut être dégagé de l’étude de Georges Salet et Louis Lafont, celui du «rayonnement humain». Il est fondamental pour la compréhension des mécanismes du déclin évolutif. Pour les deux polytechniciens la dégénérescence du monde vivant ne s’est pas produite subitement après la faute de l’homme, sous l’effet d’un décret punitif de Dieu. «Beaucoup de catholiques écrivent-ils, qui ignorent la généalogie et la Paléontologie mais qui, par suite de leur convictions religieuses, ajoutent foi au récit de la Genèse, pensent qu’aussitôt après la chute, par un miracle de Dieu, la terre se mit à produire des "buissons" et de l’"ivraie"» .
Cette dégénérescence est la conséquence d’une évolution à caractère régressif. Leur description des mécanismes du déclin de la nature vivante témoigne d’une vision chrétienne de l’homme et du monde. Le christianisme en effet n’est pas une religion «spiritualiste» mais de l’homme total, intégral, plénier. L’«union hypostatique» du corps et de l’âme explique que la dégradation spirituelle de l’homme influe sur son être corporel, sur ce que les deux auteurs appellent son «comportement physique» qui participe de son action «inconsciente» sur le monde, plus funeste encore que son action visible :
« L’homme, écrivent-ils, n’est pas un pur esprit ; il est composé d’une âme et d’un corps, étroitement unis et solidaires. Un changement de son état d’âme provoque, normalement, une certaine modification de son «comportement physique», c'est-à-dire de son action sur le milieu qui l’entoure : action directe, volontaire et consciente telle que tuer des animaux ou favoriser leur reproduction, ; cultiver le sol, abattre des arbres ; etc., et action inconsciente résultant des différentes relations entre le corps humain et le milieu ambiant […] Parmi les actes conscients nous pouvons citer à titre d’exemple le déboisement qui même très minime, et pratiqué par des hommes très peu nombreux, a pu, de proche en proche, provoquer la catastrophe carbonifère.
Quant aux réactions inconscientes, elles résultent de la solidarité de tous les êtres vivants entre eux et avec la nature inanimée. Entre les êtres vivants, les échanges chimiques, biologiques, radiants constituent autant de liens qui, malgré leur apparente indépendance d’organismes autonomes les unissent aussi intimement que les cellules d’un même corps »
Des expérimentations scientifiques ont démontré que la matière vivante émet des radiations qui ont une influence sur la matière située dans son champ. Les deux ingénieurs mentionnent le professeur soviétique Alexandre Gurwitsch qui, en 1923, découvrit que des racines d’oignons communiquaient entre elles, sous terre, grâce à des rayonnements ultraviolets. Cette communication entraînait une modification de la multiplication cellulaire dans la racine de l’oignon voisin. Le phénomène ne se reproduisit pas lorsqu’une vitre absorbant la lumière UV séparait les bulbes. De nombreux chercheurs confirmèrent par la suite la découverte de Gurwitsch. Le biophysicien allemand Fritz-A.Popp prouva, en 1975, que toutes les cellules constitutives d’un organe émettent toutes en même temps le même rayonnement. Lorsque l’organe est sain, ce rayonnement est harmonieux. Dans le cas contraire il est dysharmonieux. Notons que les cellules en question n’étaient plus seulement celles de végétaux, mais aussi de cellules animales et humaines. Toutes les expériences effectuées sur des tissus vivants démontrent qu’ils émettent des radiations mitogéniques d’une intensité variable. Elles témoignent de la solidarité universelle et, comme le soulignent les deux ingénieurs, montrent « la fausseté de la conception selon laquelle chaque individu (homme, animal, végétal) forme un petit monde fermé, un système clos qui suivrait son évolution propre indépendamment des autres êtres.Comme nous l’avons indiqué tous les êtres vivants sont solidaires, l’activité de chaque être réagissant sur celle des êtres voisins qui agissent eux-mêmes sur les leurs ; un changement dans l’activité d’un seul être se répercute de proche en proche sur tous les autres, et n’en laisse aucun absolument indifférent » .
La troisième partie de leur ouvrage a pour but d’éclairer le mécanisme physique de l’évolution régressive. Comment la faute originelle a-t-elle pu entraîner une perturbation universelle ? Dans quelle mesure l’évolution est-elle déterminée par l’attitude spirituelle de l’homme ? C’est à ces questions que les deux auteurs cherchent à répondre. C’est l’hypothèse du rayonnement physique, observable dans tout le monde vivant qui retient surtout leur attention. La perversité de l’homme ne se manifeste pas seulement par des actes visibles ; elle se traduit aussi dans l’action nocive de son rayonnement :
« En dehors d’une action physique directe, telle que le déboisement, c’est peut-être par une modification inconsciente de leur rayonnement que les premiers hommes ont agi sur les êtres vivants. Ce rayonnement a pu provoquer la minuscule baisse de vitalité des végétaux qui, nous l’avons vu, a pu suffire à entraîner, à la longue, de gigantesques catastrophes.
L’homme était une des plus importantes cellules du vaste organisme constitué par la terre et l’ensemble des êtres animés ; le pouvoir de domination qu’avait Adam sur tous les êtres nous montre assez que son rôle était capital et comparable d’une certaine façon à celui de la tête dans le corps. La tête est tombée malade et tout l’organisme a été atteint»
Ce rayonnement constitue selon eux un facteur déterminant des mutations, le plus souvent nuisibles, entraînant les modifications des espèces constatées par les paléontologistes. Le mutationnisme est la théorie scientifique qui s’accorde le mieux à leur conception. Des expériences ont prouvé que des émissions radiantes influent sur le taux de mutabilité des espèces. Dans une note très importante de leur essai les auteurs précisent la relation entre le rayonnement humain tel qu’ils le conçoivent et ces mutations qui ont joué un grand rôle dans l’évolution régressive du monde organique depuis la chute. C’est encore une fois le principe de la réversibilité qui permet d’éclairer cette relation :
« Sous quelles influences cachées, les mutations se produisent-elles ? Devant les résultats des expériences sur l’action des rayonnements artificiels, il est permis de se demander si le taux de mutabilité et le caractère des individus mutants n’est pas lié aux caractéristiques du rayonnement ambiant, et en particulier aux caractéristiques des rayonnements organiques dont nous avons déjà parlé plus haut.
Etant donné ce que nous avons dit sur les relations entre les actes spirituels de l’homme et son rayonnement physique, on peut se demander si ce rayonnement n’est pas le lien qui a assuré le rapport étroit entre la déchéance morale de l’homme et les modifications du monde animal » (cf le tigre, la guêpe etc…)
Inversement il est possible d’affirmer que l’intégrité morale et spirituelle d’un homme confère à son «rayonnement» des propriétés de purification, de régénération. Ce rayonnement est d’autant plus pur que l’âme est unie au Seigneur. C’est ce que tente de suggérer Maurice Zundel en usant d’une analogie musicale :
« De plus en plus, écrit-il, on le sentiment que le monde est un composé de radiations qui nous apparaissent sous la forme épaisse de l’expérience sensorielle : nous croyons toucher une masse alors que nous sommes en contact avec tout un rayonnement d’un certain rythme et d’une certaine fréquence. Alors rien n’empêche de penser que plus un homme est équilibré, plus il est uni à Dieu, plus ses rythmes sont ordonnés, plus son corps est musical, plus les ondes qui sont concentrées en lui s’accordent les unes avec les autres. Et c’est pourquoi il répand autour de lui la paix et l’unité…»
«Faudrait-il admettre que la faute originelle de l’homme (toute faute est, dans une certaine mesure, une faute originelle dans la mesure où elle implique un refus d’être origine) a pu désaxer l’évolution de la vie infra-humaine avant d’être effectivement commise, comme le Christ a pu sanctifier avant de naître des générations qui mettaient leur espoir dans une Rédemption obscurément promise ? Pour répondre à cette question, il importerait peut-être de se demander si la vie de l’esprit se situe dans la même durée que la vie organique (…) La conception même d’un univers, d’une totalité d’espace-temps comme d’un immense réseau en perpétuelle interaction est d’ailleurs une invention humaine. D’où prendrions-nous cette vue d’ensemble sur ces dimensions spatio-temporelles si nous étions totalement enfermés en elles ? Il se peut donc qu’en un point d’éternité, si l’on peut dire, nous ayons la possibilité d’être présents et d’agir partout et à n’importe quelle mesure temporelle».
Un autre thème peut être dégagé de l’étude de Georges Salet et Louis Lafont, celui du «rayonnement humain». Il est fondamental pour la compréhension des mécanismes du déclin évolutif. Pour les deux polytechniciens la dégénérescence du monde vivant ne s’est pas produite subitement après la faute de l’homme, sous l’effet d’un décret punitif de Dieu. «Beaucoup de catholiques écrivent-ils, qui ignorent la généalogie et la Paléontologie mais qui, par suite de leur convictions religieuses, ajoutent foi au récit de la Genèse, pensent qu’aussitôt après la chute, par un miracle de Dieu, la terre se mit à produire des "buissons" et de l’"ivraie"» .
Cette dégénérescence est la conséquence d’une évolution à caractère régressif. Leur description des mécanismes du déclin de la nature vivante témoigne d’une vision chrétienne de l’homme et du monde. Le christianisme en effet n’est pas une religion «spiritualiste» mais de l’homme total, intégral, plénier. L’«union hypostatique» du corps et de l’âme explique que la dégradation spirituelle de l’homme influe sur son être corporel, sur ce que les deux auteurs appellent son «comportement physique» qui participe de son action «inconsciente» sur le monde, plus funeste encore que son action visible :
« L’homme, écrivent-ils, n’est pas un pur esprit ; il est composé d’une âme et d’un corps, étroitement unis et solidaires. Un changement de son état d’âme provoque, normalement, une certaine modification de son «comportement physique», c'est-à-dire de son action sur le milieu qui l’entoure : action directe, volontaire et consciente telle que tuer des animaux ou favoriser leur reproduction, ; cultiver le sol, abattre des arbres ; etc., et action inconsciente résultant des différentes relations entre le corps humain et le milieu ambiant […] Parmi les actes conscients nous pouvons citer à titre d’exemple le déboisement qui même très minime, et pratiqué par des hommes très peu nombreux, a pu, de proche en proche, provoquer la catastrophe carbonifère.
Quant aux réactions inconscientes, elles résultent de la solidarité de tous les êtres vivants entre eux et avec la nature inanimée. Entre les êtres vivants, les échanges chimiques, biologiques, radiants constituent autant de liens qui, malgré leur apparente indépendance d’organismes autonomes les unissent aussi intimement que les cellules d’un même corps »
Des expérimentations scientifiques ont démontré que la matière vivante émet des radiations qui ont une influence sur la matière située dans son champ. Les deux ingénieurs mentionnent le professeur soviétique Alexandre Gurwitsch qui, en 1923, découvrit que des racines d’oignons communiquaient entre elles, sous terre, grâce à des rayonnements ultraviolets. Cette communication entraînait une modification de la multiplication cellulaire dans la racine de l’oignon voisin. Le phénomène ne se reproduisit pas lorsqu’une vitre absorbant la lumière UV séparait les bulbes. De nombreux chercheurs confirmèrent par la suite la découverte de Gurwitsch. Le biophysicien allemand Fritz-A.Popp prouva, en 1975, que toutes les cellules constitutives d’un organe émettent toutes en même temps le même rayonnement. Lorsque l’organe est sain, ce rayonnement est harmonieux. Dans le cas contraire il est dysharmonieux. Notons que les cellules en question n’étaient plus seulement celles de végétaux, mais aussi de cellules animales et humaines. Toutes les expériences effectuées sur des tissus vivants démontrent qu’ils émettent des radiations mitogéniques d’une intensité variable. Elles témoignent de la solidarité universelle et, comme le soulignent les deux ingénieurs, montrent « la fausseté de la conception selon laquelle chaque individu (homme, animal, végétal) forme un petit monde fermé, un système clos qui suivrait son évolution propre indépendamment des autres êtres.Comme nous l’avons indiqué tous les êtres vivants sont solidaires, l’activité de chaque être réagissant sur celle des êtres voisins qui agissent eux-mêmes sur les leurs ; un changement dans l’activité d’un seul être se répercute de proche en proche sur tous les autres, et n’en laisse aucun absolument indifférent » .
La troisième partie de leur ouvrage a pour but d’éclairer le mécanisme physique de l’évolution régressive. Comment la faute originelle a-t-elle pu entraîner une perturbation universelle ? Dans quelle mesure l’évolution est-elle déterminée par l’attitude spirituelle de l’homme ? C’est à ces questions que les deux auteurs cherchent à répondre. C’est l’hypothèse du rayonnement physique, observable dans tout le monde vivant qui retient surtout leur attention. La perversité de l’homme ne se manifeste pas seulement par des actes visibles ; elle se traduit aussi dans l’action nocive de son rayonnement :
« En dehors d’une action physique directe, telle que le déboisement, c’est peut-être par une modification inconsciente de leur rayonnement que les premiers hommes ont agi sur les êtres vivants. Ce rayonnement a pu provoquer la minuscule baisse de vitalité des végétaux qui, nous l’avons vu, a pu suffire à entraîner, à la longue, de gigantesques catastrophes.
L’homme était une des plus importantes cellules du vaste organisme constitué par la terre et l’ensemble des êtres animés ; le pouvoir de domination qu’avait Adam sur tous les êtres nous montre assez que son rôle était capital et comparable d’une certaine façon à celui de la tête dans le corps. La tête est tombée malade et tout l’organisme a été atteint»
Ce rayonnement constitue selon eux un facteur déterminant des mutations, le plus souvent nuisibles, entraînant les modifications des espèces constatées par les paléontologistes. Le mutationnisme est la théorie scientifique qui s’accorde le mieux à leur conception. Des expériences ont prouvé que des émissions radiantes influent sur le taux de mutabilité des espèces. Dans une note très importante de leur essai les auteurs précisent la relation entre le rayonnement humain tel qu’ils le conçoivent et ces mutations qui ont joué un grand rôle dans l’évolution régressive du monde organique depuis la chute. C’est encore une fois le principe de la réversibilité qui permet d’éclairer cette relation :
« Sous quelles influences cachées, les mutations se produisent-elles ? Devant les résultats des expériences sur l’action des rayonnements artificiels, il est permis de se demander si le taux de mutabilité et le caractère des individus mutants n’est pas lié aux caractéristiques du rayonnement ambiant, et en particulier aux caractéristiques des rayonnements organiques dont nous avons déjà parlé plus haut.
Etant donné ce que nous avons dit sur les relations entre les actes spirituels de l’homme et son rayonnement physique, on peut se demander si ce rayonnement n’est pas le lien qui a assuré le rapport étroit entre la déchéance morale de l’homme et les modifications du monde animal » (cf le tigre, la guêpe etc…)
Inversement il est possible d’affirmer que l’intégrité morale et spirituelle d’un homme confère à son «rayonnement» des propriétés de purification, de régénération. Ce rayonnement est d’autant plus pur que l’âme est unie au Seigneur. C’est ce que tente de suggérer Maurice Zundel en usant d’une analogie musicale :
« De plus en plus, écrit-il, on le sentiment que le monde est un composé de radiations qui nous apparaissent sous la forme épaisse de l’expérience sensorielle : nous croyons toucher une masse alors que nous sommes en contact avec tout un rayonnement d’un certain rythme et d’une certaine fréquence. Alors rien n’empêche de penser que plus un homme est équilibré, plus il est uni à Dieu, plus ses rythmes sont ordonnés, plus son corps est musical, plus les ondes qui sont concentrées en lui s’accordent les unes avec les autres. Et c’est pourquoi il répand autour de lui la paix et l’unité…»