Un coup d'essai, un coup de maître
Jean–Louis Foncine proposa la Bande des Ayacks au Signe de Piste en 1938. C'était à l'origine l'un des nombreux “jeux” des comédiens routiers de Léon Chancerel, qui faillit devenir un film et ne resta qu'un livre. L'argument est connu : la terreur règne au “Pays Perdu”. Une mystérieuse bande commet mauvais coup sur coup fumant. Ces “Ayacks” sont en fait les gamins du village révoltés contre la veulerie de leurs parents. Ils finissent par gagner leur cause avec l'aide de deux adultes désintéressés et d'une troupe de scouts, le tout dans une joyeuse fantaisie.
Cette histoire de gamins insurgés ne passa pas inaperçue en 1938, et l'auteur essuya, parait-il, des foudres ecclésiastiques. On n'était pas loin de l'accuser de pervertir la jeunesse. Grand succès cependant, pour des raisons à la fois semblables et différentes.
La Bande des Ayacks ne faisait pas dans le souci esthétique, ni dans le raffinement (ni dans la vraisemblance modèle 19ème siècle...) On troquait les uniformes vieil or du Prince Eric contre la vie dans les bas–culs, ou peut s'en faut. L'amitié était encore au premier plan, sous diverses formes, et on peut dire que c'est elle qui triomphait des adultes. Mais il nous faut aussi mentionner l'humour, un certain instinct de groupe, et déjà le rôle essentiel du paysage, du genius locus qui est un des personnages muets du livre et qui s’épanouira comme jamais plus après dans le Relais de la Chance-au-Roy.
<excursus coupé sur Dalens et Pierre Joubert>
Cette histoire de gamins insurgés ne passa pas inaperçue en 1938, et l'auteur essuya, parait-il, des foudres ecclésiastiques. On n'était pas loin de l'accuser de pervertir la jeunesse. Grand succès cependant, pour des raisons à la fois semblables et différentes.
La Bande des Ayacks ne faisait pas dans le souci esthétique, ni dans le raffinement (ni dans la vraisemblance modèle 19ème siècle...) On troquait les uniformes vieil or du Prince Eric contre la vie dans les bas–culs, ou peut s'en faut. L'amitié était encore au premier plan, sous diverses formes, et on peut dire que c'est elle qui triomphait des adultes. Mais il nous faut aussi mentionner l'humour, un certain instinct de groupe, et déjà le rôle essentiel du paysage, du genius locus qui est un des personnages muets du livre et qui s’épanouira comme jamais plus après dans le Relais de la Chance-au-Roy.
<excursus coupé sur Dalens et Pierre Joubert>
La morale de Foncine : des camarades bien nés
Foncine, quant à lui, garda une indépendance farouche vis–à–vis de la culture dalensienne servilement imitée après coup par nombre de romanciers scouts. (Aurait-il pu faire, lui aussi du sous-Dalens? Nous en doutons. On a l’impression qu’en effet les livres sortent tout armés de la plume de cet auteur, et qu’ils viennent avec aisance . Je peux me tromper fort, mais il me semble que Foncine a une disposition naturelle à « faire du Foncine », et cela facilement, ce qui explique la personnalité prononcée de ses romans, ainsi d’ailleurs que leur moindre apprêt.) Foncine, disions-nous, mit en scène des amitiés, certes, mais des amitiés dans un groupe. La camaraderie était préférée aux relations personnelles, et les camarades que dépeignait Foncine restaient exceptionnels : pas de superficialité, donc. La morale extérieure n'existait pas, les camarades la recréaient ou la retrouvaient intuitivement, sans effort. C'étaient des gens bien nés. Dalens : des individualités dans une société d’adultes, Foncine : les adultes menacent l’existence de la bande de jeunes qui est au commencement. Il y a bien entendu des exceptions, on voit bien une patrouille dans le juge avait un fils, et le héros du glaive de Cologne est parfois tout seul.
Le chef d'oeuvre : le Relais de la Chance au Roy
Achevé en 1940 aux armées, le Relais de la Chance au Roy est par excellence le livre du Pays Perdu. Une épigraphe d'Alain–Fournier abonde dans ce sens. Il présente une patrouille scoute aux prises avec un jeu pris pour la réalité. La forêt est pour ainsi dire le personnage principal, tend elle–même ses chausse–trappes et ses bonnes fortunes à des scouts qui n'en peuvent mais. Ce sont moins les paysans que le terroir qui agit. Le livre ne s'achève–t–il pas par un épilogue nommé le domaine revivra? Foncine écrivit là un roman dans la rare lignée du créateur du Grand Meaulnes, admirable à tout point de vue.
Après la guerre :
A partir de 1945, plusieurs moutures du Foulard de Sang, le plus secret de ses romans, dévoilèrent l'existence d'un ordre de chevalerie adolescente, l’un des derniers flamboiments du mythe de la chevalerie à la scoute. Secret, bande de jeunes, tout Foncine était là, fors l'amitié remplacée en ce temps de guerre par la fraternité d'armes. Le Foulard fut un exemple concret de chevalerie contemporaine à une époque où la figure du chevalier allait décliner. L'ordre existe encore de nos jours, mais les personnes que nous avons pu rencontrer ou les statuts exotériques que nous avons pu lire nous laissent croire que son niveau n’est plus celui du roman éponyme. On lira pour s’en convaincre les épilogues contemporains que l’auteur rédigea pour les rééditions Safari S-d-P ou d’Elor.
Mentionnons aussi parmi d'autres deux livres exaltant le pardon autant que l’aristocratie raider, le pardon entre français (Les Forts et les Purs, 1953) et le pardon franco–allemand (Le Glaive de Cologne, 1954). Mentionnons enfin de toutes récentes mémoires (Un Si Long Orage, 1995) où l'on sent l'essayiste transparaître sous le romancier. Foncine a connu des gens bien intéressants, mais hélas il n’en parle guère.
Par delà les différences, Dalens et Foncine ont un point commun qui sera ensuite partagé par les autres auteurs : amitié d'abord! La griffe de Joubert achèvera d'associer amitié et beauté... Le succès ne s'est pas démenti depuis
Les photos sont piquées sans permission à
www.signe-de-piste.com
Mentionnons aussi parmi d'autres deux livres exaltant le pardon autant que l’aristocratie raider, le pardon entre français (Les Forts et les Purs, 1953) et le pardon franco–allemand (Le Glaive de Cologne, 1954). Mentionnons enfin de toutes récentes mémoires (Un Si Long Orage, 1995) où l'on sent l'essayiste transparaître sous le romancier. Foncine a connu des gens bien intéressants, mais hélas il n’en parle guère.
Par delà les différences, Dalens et Foncine ont un point commun qui sera ensuite partagé par les autres auteurs : amitié d'abord! La griffe de Joubert achèvera d'associer amitié et beauté... Le succès ne s'est pas démenti depuis
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